Courtoisie

{ Feat. Oren ─ Été 2025}

Après quelques années à vivre à Sweetdreams, Kajta avait fini par identifier avec succès les meilleures places en ville. Elle sortait fréquemment, après tout : que ce soit auprès de Raphaël ou dans le cadre de son travail. Offrir une soirée agréable à des clients, récompenser quelqu'un, faire pencher la balance pour un contrat.. Elle naviguait dans cet univers depuis assez longtemps pour en connaître les ficelles.

Elle avait donc choisi ce restaurant 5 étoiles sans grande difficulté, puisqu'il avait l'un des meilleurs services de la ville. Rien de mieux pour son invité ─ autant parce qu'il le méritait amplement que parce qu'il devait être habitué à ce genre de luxe. Car évidemment, avant d'avoir amené son fils le consulter, elle avait lancé plusieurs recherches à son sujet pour s'assurer de son identité, et était donc tombée sur son joli héritage.

Lui ayant donné rendez-vous à 7h00, la femme était arrivée une quinzaine de minutes plus tôt, pour s'assurer que la réservation tenait toujours. Un serveur l'avait escorté jusqu'à sa table, posée dans l'un des coins de la pièce. Comme pour tout bon restaurant qui se respecte, la lumière était tamisée, aux teintes bleutés, et le ton des conversations ne montaient jamais bien haut. Accoudée contre sa chaise, Katja avait déjà un verre de vin à la main et observait ce qui l'entourait de ses yeux lourdement maquillés.

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Comme ses yeux balayaient l'emplacement, revenant à intervalles régulières vers l'entrée, la femme ne tarda pas à remarquer l'asiatique qui s'y présenta. Sa petite taille et son air jeune (quoique, à son avis, la majorité des asiatiques avaient l'air jeunes, jusqu'à temps qu'ils mûrissent d'un coup) le faisaient légèrement détonner des autres clients (souvent des gens d'affaire, plus âgés), mais ses habits étaient tout aussi classieux qu'ils devaient l'être en l'occasion.

Le serveur ne tarda pas à le mener à la table, de laquelle Katja se leva pour l'accueillir en inclinant tout aussi poliment la tête. Cette fois accompagnée d'Oren, elle reprit place sur son siège. L'homme leva un petit sourire sur ses lèvres, l'air un peu incertain. Mais, de ce qu'elle avait pu remarquer, il abordait cet air assez souvent ; la seule exception qu'elle avait pu voir, c'était lorsqu'il s'était mis à l'oeuvre sur les jambes de Jamie. Là, la concentration avait remplacé son petit malaise, quelle qu'en soit la cause. Mais dans un restaurant chic, c'était une autre paire de manches.

« C'est gentil de m'avoir invité. »

Elle inclina sa tête en diagonale, acceptant le remerciement, mais rétorquant toutefois :

« C'était bien le moins que je pouvais faire, après votre aide pour Jamie. »

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La gêne ne fut pas difficile à reconnaître sur son visage. Elle leva un sourire, amusé de voir si peu incliné à accepter un remerciement. Et pourquoi donc ? Ne pensait-il pas qu'il avait eu un impact majeur dans la vie de Jamie ? Retrouver l'usage de ses jambes.. C'était un cadeau merveilleux. Qu'Oren soit capable d'une telle guérison relevait presque du miracle.

« Vous vous êtes donné du mal pour me trouver » chercha-t-il à se justifier, « je ne pouvais pas le laisser comme ça. »

Il était vrai qu'elle s'était donnée du mal, de même que Raphael, des années durant pour résoudre le problème de leur fils. Et ce n'était qu'avec l'aide d'Elcy qu'ils y étaient enfin parvenu.. Mais Katja s'opposait à ce qu'il avançait. Elle nia de la tête.

« Ah... Certes, l'altruisme dicte d'aider ceux dans le besoin... »

Elle laissa couler son regard vers lui, appuyant ses mots.

« Mais nombreux sont ceux qui n'en auraient rien à faire, de l'altruisme et d'aider les autres. Surtout pas sans rien en retour. Alors, je vous en remercie sincèrement. »

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Elle n'aurait pas cru qu'Oren serait devenu encore plus malaisé, au contraire : normalement, le mélange de vin, plats et conversation finissait par dégêner ses interlocuteurs. Pas chez l'asiatique. Katja laissa le silence persister quelques instants, profitant qu'Oren eut détourné le regard pour l'observer à loisir. Puis, comme le temps commençait à être long, et qu'à se rythme, le souper serait bien ennuyeux, elle retrouva sa voix et se moqua gentiment :

« Quel talent pour la conversation. »

Sans vouloir laisser le reproche demeurer dans l'air trop longtemps, elle désigna de la main les menus qu'un serveur avait déposés devant eux.

« Ne vous gênez-pas pour commander, la nourriture est fabuleuse ici. »